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par Léonard DERMARKARIAN, le Samedi 29 juillet 2023 à 19:21, mis à jour le Lundi 4 septembre 2023 à 10:13
Face à des prix “beaucoup plus élevés” et des “inégalités accrues” dans les territoires ultramarins par rapport à la France hexagonale, le président Renaissance de la commission d’enquête cible des normes inadaptées et le rapporteur socialiste souhaite un plan d’action immédiat pour lutter contre la vie chère en outre-mer.
Présidée par le député Renaissance Guillaume Vuilletet et rapportée par le député socialiste Johnny Hajjar, le rapport (disponible ici) restitue près de six mois de travaux de la commission d’enquête parlementaire demandée par les députés socialistes après leur proposition de résolution en février dernier. L’objectif principal ? Tenter de donner une “appréciation objective, globale et détaillée” sur la “vie chère” dans les territoires ultramarins régis par les articles 73 et 74 de la Constitution.
UN “PROBLÈME HISTORIQUE”, DES NORMES INADAPTÉES
Rappelant l’héritage historique de la colonisation, menant les territoires ultramarins à développer des “cultures d’exportation” et à dépendre en retour massivement d’importations en provenance de l’Hexagone, le rapport de la commission d’enquête documente des revenus plus faibles qu’en Hexagone alors que le “niveau des prix [est] beaucoup plus élevé”, “en hausse continue” depuis vingt ans, selon le rapporteur socialiste Johnny Hajjar.
En cause : une “concurrence très limitée, une production locale insuffisante, des importations historiques très importantes, des oligopoles et des monopoles” ainsi qu’un “sous-financement”des collectivités territoriales pointé par le rapport, menant, pour y remédier, à une hausse de la fiscalité locale ou à une baisse du service public de la population.
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Pour Guillaume Vuilletet (Renaissance), président de la commission d’enquête, le problème est également juridique : les travaux ont ainsi montré que certaines normes étaient inadaptées, citant notamment l’exemple des plaques de plâtre importées d’Hexagone pour des travaux de construction dans certains territoires ultramarins.
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DES OUTILS INSUFFISAMMENT EFFICACES
Face à ce constat, le rapport estime que les outils mis en place par l’État “n’ont pas atteint leurs objectifs”. C’est notamment le cas du “bouclier qualité-prix” (BQP), un dispositif mis en place les départements et régions d’outre-mer (DROM) en 2012. Selon le rapport, le BQP est un “outil limité à améliorer”.
Au-delà des mesures d’aide comme le BQP, le rapport pointe également “un manque d’ambition de l’État pour quantifier, étudier et dénoncer” le coût de la vie dans les territoires ultramarins : le rapport déplore ainsi l’absence de moyens pour diverses structures, comme les Observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR) ou le Délégué interministériel à la concurrence, et pointe une “proximité parfois troublante entre certains responsables politiques et économiques”.
“NÉCESSITÉ DE RENOUVELER LES OUTILS ET LES SOLUTIONS”
Urgence de la situation et insuffisance des réponses actuelles poussent les rapporteurs à juger nécessaire de “renouveler les outils et les solutions” en proposant un panel de mesures : “augmentation significative des salaires” (de 20%, souhaite le rapporteur) fiscalité, stimulation de la concurrence et de la production locale (notamment par les circuits courts), lutte contre l’économie de rente et “[encouragement] des échanges économiques régionaux” sont autant de pistes avancées pour changer la donne.
Le rapport propose également une réflexion sur la situation politique des territoires ultramarins, en appelant notamment à s’inscrire dans les pas de l’appel de Fort-de-France paru l’année dernière et en invitant à une modification de la Constitution, le cadre institutionnel étant désormais jugé “inadapté” par le rapporteur.
LORSQUE LE PATIENT EST EN ÉTAT D’ARRÊT CARDIAQUE, IL N’EST PLUS TEMPS DE PRENDRE DES MESURES PALLIATIVES. JOHNNY HAJJAR (SOCIALISTES), RAPPORTEUR DE LA MISSION D’INFORMATION
Sans que le président de la commission Guillaume Vuilletet (Renaissance) ne s’y associe, le rapporteur de la commission d’enquête Johnny Hajjar (Socialistes) propose “vingt mesures pour un déchocage économique et social des territoires ultramarins”, notamment :
- La tenue de négociations commerciales avec les grands groupes de distribution ultramarins pour parvenir à une “baisse de 10 à 20% des prix sur la majorité [des] références” ;
- La majoration et l’automatisation des prestations sociales légales, réhaussées d’un différentiel reflétant le coût de la vie ;
- Le conditionnement des “aides à l’embauche, dans le cadre des zones franches globales ou de tout autre dispositif favorisant les embauches, au recrutement de résidents du territoire ultramarin concerné”.
“CE RAPPORT N’EST PAS UN ABOUTISSEMENT, MAIS UN COMMENCEMENT”
Au terme de son examen à huis clos par la délégation à l’Outre-mer, les groupes Renaissance, Rassemblement national, les Républicains et Libertés, Indépendants et Outre-mer (LIOT) ont indiqué s’abstenir sur le rapport, sans que cela n’empêche toutefois son adoption.
Lors d’une conférence de presse jeudi dernier, le rapporteur Johnny Hajjar (Socialistes) a souhaité que ce rapport ne soit pas “ un aboutissement, mais un commencement”. Si l’Assemblée nationale suspend ses travaux pour l’été, nul doute que la question de lutter contre la vie chère dans les Outre-mer reprendra dès la rentrée parlementaire, à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) de l’année 2024.